jeudi 26 janvier 2017

MA RECETTE POUR LA RECONCILIATION NATIONALE EN COTE D'IVOIRE

MA RECETTE POUR LA RECONCILIATION NATIONALE EN COTE D'IVOIRE

     Depuis l'indépendance de notre cher pays, la Côte d'Ivoire, la politique de « Francisation » des Ivoiriens a été mise en avant par les premières autorités, à leur tête, le premier Président Félix Houphouët Boigny au détriment de l'« Ivoirisation » ou de l'identité culturelle ivoirienne et de la promotion de notre culture. C'est dans cette optique que le français, jusqu'à nos jours, demeure la langue officielle. L'administration ivoirienne (même l'effet vestimentaire) est calquée sur le modèle français, les lois, les Institutions, l'éducation (école et université), la formation, sont purement de couleur française. Ainsi pendant que le sommet (la minorité riche) respire et nage dans le système français, le rêve occidental, la base (le peuple, la majorité pauvre) reste les pieds encrés dans les réalités. Alors, la déconnexion des pouvoirs publics d'avec les réalités quotidiennes des Ivoiriens est palpable. Les autorités vivaient et continuent de vivre dans un pays virtuel à tel point qu'ils ne font plus attention à la portée politique, économique et socio-culturelle de leurs actions sur le peuple, dont ils ont les destinées entre les mains. Ils votent des lois, signent des décrets, prennent des décisions, avancent des propos, posent des actes politiques majoritairement incompatibles avec les réalités socio-culturelles. Nous nous trouvons donc confronter à deux réalités différentes dans le même pays. Les riches au pouvoir déconnectés. Les pauvres dans la masse vivant les réalités vraies du pays.

     C'est dans cette réalité politique, économique et socio culturelle que le Président Houphouët géra le pays de 1960 jusqu'en 1993, date de son décès. A mon humble avis, l'identité culturelle ivoirienne na pas été le lead politique du Vieux. Cependant, le Président Houphouët a bien réussi une certaine forme « d'Ivoirité ». Cette « Ivoirité »  Houphouétistes se manifestait par une intégration interne des Ivoiriens entre eux. Elle s'exprimait dans la politique des affections des fonctionnaires dans les régions selon leur appartenance ethnique ou religieuse. On notait par exemple des jeunes fonctionnaires Bété (au Centre-Ouest) être affectés chez les Sénoufos (au Nord),  des fonctionnaires Baoulé (au Centre) être affectés chez les Ebriés (au Sud), des fonctionnaires Yacouba (Ouest) être affectés chez les Agnis (Est), etc .. Ces affectations engendrèrent la création de milliers de couples métissés (différentes ethnies et même religion). Il faut reconnaitre que cette politique a rapproché les Ivoiriens de sorte qu'aujourdhui, dans chaque famille ivoirienne d'une ethnie donnée, l'on peut trouver un ou deux membres originaires dautres ethnies ou familles. Cette valeur Houphouétistes, ce brassage ethnique, religieux et culturel a joué un très grand rôle dans l'apaisement des coeurs avant, pendant et après les différentes crises qu'a connues notre pays. Malheureusement, cette politique non seulement na pas été institutionnalisée, mais son esprit a été bafoué par les successeurs du père Fondateur de la Nation.

     Après le décès du Président Félix Houphouët-Boigny et l'avènement du Président Bédié au pouvoir, le pays a connu une rivalité presqu'atroce entre les partisans de M. Bédié et ceux de l'ex-Premier ministre, M. Alassane Ouattara (actuel Président de la République). Cette « animosité » dévoilée a donné naissance au concept « IVOIRITE ». Malheureusement, ce concept avait plutôt une forte connotation politique basée sur l'exclusion, la xénophobie et sur la classification des ivoiriens que sur le rassemblement de tous les citoyens autour des valeurs socio culturelles de notre cher pays. Sa principale mission était de détruire par tous les moyens la carrière politique naissante de M. Ouattara. Alors, en lieu et place donc, de la promotion dune vraie identité culturelle ivoirienne, qui pourrait avec le temps remplacer la « francisation » de la nation et créer une vraie cohésion sociale, l'on fît face à des bagarres ethniques, tribales, religieuses, régionales au sommet de l'Etat. Ce qui impactera négativement les populations. Une haine sans précèdent habitera les uns et les autres. L'atmosphère du pays changea de manière dramatique jusqu'au coup d'Etat de 1999 qui vu le renversement du président Bédié et l'ascension du Général Guéi au pouvoir. Une fois encore, la recherche de l'identité culturelle, l'" Ivoirisation » du système politique échoua et créa des tensions politiques et sociales dans le pays.

     N'étant pas adepte des coups de forces d'une part, et malgré mon opposition à la politique xénophobe de M. Bédié, d'autre part, je restais méfiant et farouchement contre larrivée de Guéi au pouvoir. Il est vrai que ce dernier suscita un bref espoir dans les coeurs de certains Ivoiriens. Mais j'étais écoeuré, sceptique et pessimiste (mes proches de cette époque peuvent le témoigner). L'ignorance politique et la folle envie du Général à rester au pouvoir et les violences qui suivaient me réconfortèrent dans ma position à son égard. Cette nouvelle soif de confiscation du pouvoir par le Général engendra le plus grand fossé à la cohésion sociale entre les Ivoiriens. Il fut de plus belle manière la promotion de cette « Ivoirité » de division, d'exclusion, de xénophobie et de haine. Ce, à travers la promotion de deux conjonctions de coordination, le "Et" et le "Ou" ; qui ont lamentablement failli à leur mission de rapprocher les filles et fils de la Côte dIvoire. Sa rage aveugle pour le pouvoir et son entourage égoïste et ignorant favorisa l'arrivée au pouvoir du Président Gbagbo à la suite d'une élection reconnue « calamiteuse » par M. Laurent Gbagbo lui-même. Une fois encore, les Ivoiriens n'ont pas eu l'opportunité de se retrouver autour d'une valeur culturelle, une identité culturelle ivoirienne.

     Avec le Président Gbagbo, qui peut-être avait une idée moins claire de la « défrancisation » du pays sans toutefois travailler sur les institutions, les Ivoiriens vont connaitre et vivre des périodes très difficiles. Ils connaitront une rébellion avec son corolaire de perte en vies humaines et en biens. Une division du pays, une division des Ivoiriens, une grosse crise postélectorale, une guerre fratricide, un appel international, une ingérence militaire étrangère pour certains en faveur de la paix et pour d'autre en faveur d'un camp. Mais la réalité socio-politique est exprimée par l'existence de trois camps. Les pros Ouattara, les pros Gbagbo et ceux qui en ont marre des deux premiers camps.

     Un fait très particulier est resté marqué dans ma mémoire et j'aimerais le partager avec vous. Ce fait pourrait longtemps gêner la cohésion sociale et la réconciliation, si rien n'est fait. En effet, en 2011, à l'investiture du président Ouattara à Yamoussoukro, à travers le président Sarkozy, la France  a été longuement ovationnée par les pro-Ouattara, pendant que les pro-Gbagbo manifestaient à leur tour une grosse haine envers la même France. Parce que pour eux, grâce à l'intervention aérienne de la France, le président Gbagbo a été délogé et arrêté. Ainsi la même France, aujourd'hui détestée par les pros Gbagbo  ne pourrait reconquérir leur coeur que si seulement si, elle arrive à déstabiliser le pouvoir Ouattara à leur profit ou au profit d'un autre Ivoirien opposé à M. Ouattara. Dans ce cas, ceux qui l'avaient applaudi en 2011 la haïraient. La France sait que cette division existe et est profonde. Alors elle peut continuer à jouer le jeu et protéger ses intérêts. Elle sait que le président Ouattara ne pourra jouir du soutien total de tous ses compatriotes. Pourtant, pour que nous arrivions à créer les bases de la réconciliation réelle, il faut nécessairement la rupture avec cette mentalité manipulable des Ivoiriens. Quand  tous les Ivoiriens sans considération politique, ethnique, tribale, religieuse et régionale, comme un seul arriveront à dire "Non" à certaines ingérences politiques, militaires, culturelles étrangères et se retrouveront autour d'une identité culturelle, une vraie « Ivoirité », exprimée par des institutions décomplexées et désaliénées. Alors, non seulement le pays accèdera à une souveraineté vraie, mais aussi à une démocratie vraie, gage de la réconciliation vraie. Malheureusement, ici encore, les valeurs culturelles ont été ignorées dans le règlement de la crise postélectorale. Si « l'Ivoirité » vraie incarnée par les valeurs traditionnelles, coutumières et culturelles ivoiriennes existaient, nous ne connaitrions jamais la guerre. Et sous l'Arbre à Palabre, les Ivoiriens règleraient leurs différends. Personnes ne serait, en effet, envoyé devant les tribunaux à l'étranger (CPI) et aucun Ivoirien ne serait incarcéré à la HAYE. Ainsi, tous les pouvoirs qui se succèderont seraient forts et non manipulables des puissances étrangères.

     Jusqu'aujourd'hui, ce qui n'a pas marché en Côte d'Ivoire, c'est évidemment l' « Ivoirisation » objective et de bonne foi du système politique, économique, scientifique, social et culturel du pays. Depuis les indépendances, les différentes autorités gouvernent comme des chauves-souris et entrainent le peuple à la dépersonnalisation, à la l'aliénation culturelle, à l'acculturation. Ainsi l'Ivoirien existe juste de nom. Rien de pratique et même les différentes institutions ne sont pas rassembleuses dans le sens vrai du thème, car dépouillées de toutes les valeurs sociales, traditionnelles, coutumières et culturelles ivoiriennes. Pour l'unité nationale, une politique « d'ivoirité » vraie et rassembleuse doit surgir des vraies institutions inspirées de nos valeurs traditionnelles, coutumières et culturelles. La réconciliation nationale se fera delle-même si seulement si les acteurs politiques, les acteurs culturels, les autorités traditionnelles (Rois et chefs de village), les acteurs ivoiriens du monde des droits de l'homme et du monde judiciaire se mettent ensemble de manière objective pour créer enfin l'IVOIRITE vraie. L'ivoirité, l'identité culturelle ivoirienne, incarnée par le chef de l'Etat lui-même (dans ses effets vestimentaires, ses décisions politiques et économiques, des actions culturelles et sociales, etc.), ensuite par le Vice-Président, les Présidents des institutions, le Premier Ministres, les Ministres, les hauts cadres et enfin promu par nos médias publics, nos écoles et universités, nos stars (musique, art, sport), les Ivoiriens se reconnaitront, se mettront au-dessus des considérations partisanes, respecteront leurs institutions, se retrouveront autour d'elles et les défendront contre vents et marées. Ensemble, on ira avec des idéologies différentes à la réconciliation nationale vraie.

     Voici ainsi ma modeste contribution, jespère pouvoir aider les uns et les autres à mettre en place les bases réelles et sincères, favorisant la réconciliation nationale en Côte dIvoire. La création de structure spéciale avec des milliards de budget ne pourra objectivement et durablement réconcilier les Ivoiriens. Il faut une valeur culturelle (identitaire) autour de laquelle se reconnaitront et se retrouveront tous les Ivoiriens.

Je vous remercie
Seydinan Chérif Ahmed
Activiste culturel

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire